No pasarán !
Face à la haine fasciste, il n’y a qu’une seule posture possible : la colère et l’amour. Non, ce n’est pas antinomique, sauf pour les haineux.
Et une seule stratégie possible : la paix et le combat. Là encore, ce n’est pas du tout antinomique, sauf pour les haineux.
Tout le reste est voué à l’échec. À commencer, bien entendu, par l’abandon.
Je ne vais pas revenir sur l’intéressante situation géopolitique de 2025. La haine a gagné le droit de cité au sein de tous les gouvernements. Les formations politiques traditionnellement conservatrices et capitalistes ont tous déplacés leur curseur vers un fascisme plus ou moins décomplexé et un ultra-capitalisme effréné. Rien de surprenant, cela a commencé depuis 2018. Le déclencheur de tout cela ?
Deux choses paradoxales : le mouvement « Me too » et le dérèglement climatique.
Le premier a exposé en pleine lumière la raison profonde et fondamentale des luttes féministes et égalitaires, donnant un élan final à toutes les luttes progressistes, et donc, apparaissant comme un danger mortel. « Me Too », c’est l’essence du terme « woke » et du sobriquet wokisme. Cet élan international de lutte pour l’égalité, le progrès humaniste et le socialisme, dans son sens le plus philosophique : l’idée de progrès, c’est-à-dire de la transformation du monde dans un sens positif : dans son acception la plus large, il condamne les inégalités sociales et l’exploitation de l’homme par l’homme et défend le progrès social.
En gros, ce mouvement et ses conséquences a éveillé une conscience (c’est le sens exact de woke : éveillé) sociale et humaniste puissante qui a déferlé partout, avec ses bienfaits… et ses dérives. Un danger mortel pour toutes les idéologies conservatrices. Un fait, un danger mortel pour toutes les sociétés sexistes et patriarcales, c’est-à-dire : quasi toutes.
Le second est paradoxal, mais vous allez vite comprendre. Le dérèglement climatique est un danger mortel à moyen terme (enfin, maintenant, c’est à court terme, hein), dont la seule solution viable pour l’endiguer a pour effet de remettre en question la thèse de la croissance infinie, phantasme économique datant du 19ème siècle sur laquelle s’appuie toute l’idéologie du capitalisme. La décroissance est absolument incompatible avec l’hyper-capitalisme moderne, qui n’a donc qu’une solution : nier le problème, et surtout le réfuter publiquement.
Mais le dérèglement climatique, qui ne peut aller qu’en empirant, a aussi un autre effet, qui va être important pour comprendre la suite : il accentue les guerres et les déplacements de population. Les réfugiés climatiques ne sont plus un mythe, et ils sont désormais des millions, principalement venus d’Afrique et d’Amérique Centrale, à abandonner des terres stériles, désertifiées ou noyées, pour tenter de trouver une terre d’accueil. Et bien sûr, c’est un terreau parfait pour provoquer des guerres, qui jettent encore plus de millions de gens sur les routes, qui désespérés, viennent tenter d’entrer dans ces nations qui semblent, à raison, pour eux, des paradis : l’Europe, l’Amérique du nord…
Des millions d’étrangers menaçant les frontières d’anciens pays colonialistes se croyant les maitres du monde. Une menace parfaite à brandir pour tout mouvement politique fascisant, quand bien même 99% de ces réfugiés ne constituent pas le moindre danger. Et la cause ? La cause, on s’en fout. Pas question d’y remédier.
Sur quoi se vend le fascisme ?
La négation de la science, le virilisme misogyne et la théorie des races et du concept de guerre raciale. Je pourrais rajouter la haine de tout ce quoi est différent de leurs normes, mais ce serait juste soulever l’évidence.
Historiquement, tous les fascismes, à l’exception des dictatures communistes, toutes aussi abjectes (et encore, quand on creuse, on réalise vite qu’elles se basaient bien sur des économies hégémoniques et une oligarchie riche), se sont bâtis sur la complicité entre des politiques fascistes, et des entreprises puissantes aux intérêts menacés. C’est comme cela que Mussolini a pris le pouvoir, et Hitler l’a imité comme s’il suivait le mode d’emploi. C’est comme cela qu’ont prospéré les dictatures fascistes d’Amérique du sud (et certaines communistes aussi). C’est pratique quand les entreprises qui te financent sont des poids lourds américains ou russes.
Le fascisme, c’est la complicité entre des politiques réactionnaires et de grandes entreprises qui veulent conserver leur privilège. Le résultat de cette complicité consiste à créer une oligarchie indiscutable, en détruisant le système démocratique. Chacun des deux parties préserve alors le pouvoir de l’autre… enfin, tant que cela leur va.
Et le peuple ? Le peuple, on a semé le doute, l’incertitude, la peur et le trouble dans ses opinions, devant une situation déjà complexe, qui lui impose tant de changements qu’il refuse d’assumer. On a brouillé à ses yeux la frontière entre éthique et immoralité, on lui a montré des mensonges grossiers, mais basés sur des faits déformés, pour qu’il ne sache plus quelle réalité est objectivement la bonne. On lui a désigné des responsables et des ennemis, en inventant maladies, démences et perversions dont ces ennemis seraient responsables. On a détruit tous ses repères, méthodiquement. Ça prend du temps : quelques années de travail de sape très couteux. Mais l’argent, ce n’est pas un souci non plus, surtout quand de grandes entreprises sont là pour financer ces dépenses.
Et puis, on lui a donné une solution, à ce peuple : face à toutes ces menaces et ce monde brouillé, la solution, c’est le chef fort qui le débarrassera de tous ces ennemis si effrayant ! Il suffit que le peuple lui donne le pouvoir total. Face à un problème si compliqué que tout esprit s’y perds, le fascime offre une solution simple.
Le fait que cette solution ne réglera rien, car sa seule manière de régler un problème est de le détruire par la force en causant des milliers ou des millions de morts injustes et inutiles. Mais ça, le peuple ne peut même pas le comprendre. Le chef ne parle-t-il pas de paix, d’ordre et de sécurité ? Ne promets-il pas à manger et un tout pour tous ceux qui le suivent ?
C’est l’essence même du fascisme. Et sa finalité ? On la connait : le vertige du néant et l’autodestruction assurée. Insérez ici morts par millions. Ce qui est amusant, si on a un humour cynique, c’est que les grandes entreprises complices, elles, ont tendance à s’en sortir. Ho, pas toutes. Mais une entreprise n’a qu’une politique : aller vers l’idéologie qui lui assure toujours une croissance économique. Alors, quand le vent tourne, elle tourne avec.
Ce qui fonctionnant en 1933, dans un autre contexte, mais tout aussi brouillé, et difficile à comprendre, fonctionne encore mieux en 2025. Parce qu’en 1933, il n’y avait ni internet, ni réseaux sociaux, ni menace planétaire capable de ravager la civilisation humaine. C’est donc encore plus facilement et tout aussi rapidement que le fascisme de 2025 est revenu en force. Sa solution pour régler les problèmes auxquels fait face l’humanité ? Les ignorer et écraser, pour faire taire les alertes et les revendications. Bien entendu, ça ne va pas arréter le dérèglement climatique et, bien entendu, cela ne va pas faire cesser les revendications progressistes. Cela va juste provoquer des guerres et des millions de morts.
Le fascisme ne connait aucune autre forme de solution.
Et sérieusement, face à une telle déferlante de moyens pour souffler le vent de la haine fasciste, face à tant de victoires, il est totalement compréhensible de vouloir abandonner. À quoi bon, après tout ? Sa semble irrésistible.
Mais justement, ça n’est pas irrésistible. Le fascisme se base aussi sur cet espoir : que la moitié des gens, qui le refusent, et le rejettent, baissent les bras. Il ne peut compter que sur une minorité, qui, en ce moment, est faible, nettement plus qu’en 1933. Pourquoi ? Parce qu’internet et les réseaux sociaux. La propagande, ça fonctionne quand vous contrôlez totalement et absolument les outils de communication et que personne ne vous voit exercer ce contrôle. Et en 2025, c’est juste impossible d’y parvenir. Le fascisme ne pourra pas rallier une majorité, même s’il commence à prendre le pouvoir. Il peut bien tout faire pour faire taire les revendications et les voix contraires, il n’en a pas les moyens sauf à établir une dictature totale, ce qui est là aussi devenu très difficile en 2025.
Mais il pourrait y arriver. Si on abandonne, si on pense qu’on ne peut plus se battre.
Vous n’êtes pas seuls !
Vous, les progressistes, les humanistes, les démocrates, les socialistes, vous êtes des millions. Vous, les wokes, soyez fiers de ce mot, vous êtes le progrès humain qui espère un avenir plus heureux, plus égalitaire et plus paisible pour tous, sans considération de couleur de peau, de nationalité, d’orientation sexuelle, de genre, et j’en passe…
Vous n’êtes pas seuls !
Vous, tous, les wokes, devenez antifascistes car il n’y a désormais plus d’alternative, plus de coin où se cacher et attendre que cela passe. Il n’est plus temps de se mettre de côté : soit c’est l’abandon et la défaite, soit c’est la lutte et la victoire. Est-elle possible ? Totalement. Est-elle proche ? Nettement plus qu’elle ne l’était en 1933.
Ne renoncez pas. Faites de vos groupe d’amis, dans votre environnement social, sur les réseaux sociaux, dans vos clubs, dans vos associations, des espaces à jamais antifascistes ! Ne tolérez rien de l’intolérable ! N’oubliez jamais que la haine fasciste ne vous tolère pas, car elle ne tolère aucune liberté de penser et d’agir en dehors de ses normes. Cette haine a désigné son ennemi. Er cet ennemi, c’est vous tous !!
Luttez, de votre mieux, mais surtout : luttez politiquement et socialement. Car sinon, il vous faudra lutter les armes à la main, et risquer la mort. Il vous reste une chance d’éviter cela, et de vous le monde brûler. Une bonne chance, à saisir maintenant.
Luttez ! Au néant, les fascistes, bordel ! No pasarán !