« J’parle pas aux cons, ça les instruit. »
Trigger warning : ça va pas être poli. Si vos yeux sont sensibles aux mots de Rabelais, Desproges, Coluche ou encore Audiard, mais aussi ceux de Rage Against The Machine ou encore Trust, voici un discours de remerciement de l’Académie Française pour vous consoler de mon outrecuidance !
C’est bon ? Tout le monde est là ?
Bon, après une semaine de cyberharcèlement, je suis remontée comme un coucou. D’ailleurs, j’ai écris cet article sur fond d’Iron Maiden, histoire d’assurer l’ambiance sonore. Donc, c’est un billet d’humeur personnel, si vous voyez le clin d’œil.
Ok. Je ne cause pas avec les cons ; jamais. Définissons con (pas l’organe sexuel, le quidam homo sapiens): individu qui se satisfait de son inculture et s’en vante, qui se rengorge de sa supériorité de mâle blanc cis, qui méprise la science sauf quand il peut la tordre pour servir ses idées merdiques, que je soupçonne enfin de partager des idées plus proches du tortionnaire colonial du Congo Belge qui humilie sa femme et défonce sa gosse, que de l’humaniste bienveillant qui s’inquiète aussi bien de la santé de la planète que de celle des ouvriers indiens qui crèvent à trente ans pour qu’il ait son smartphone.
Le premier est socialement, de la catégorie des gugusses qui trouveraient que Macron est encore un peu trop gauchiste, éthiquement que Trump est parfaitement fréquentable, et humainement que Zemmour n’a pas tort, on devrait l’écouter pour le Grand Remplacement et le danger de perversion gauchiste.
Le second se demande juste comment ses enfants vont survivre dans moins de dix ans dans une civilisation de tyrannies réactionnaires en guerre que ne voudrait même pas imaginer Margaret Atwood, dans un monde en train de crever de chaud, de soif et de pollutions, peuplé de 7 milliard de pauvres et de 50 000 milliardaires.
Le premier pense que le second va détruire son ordre moral sec, rabougri, égoïste, injuste, inique et connard. Le second pense que le premier va juste détruire l’humanité en tant que civilisation et espèce, juste parce qu’il s’en bat les boules.
Le premier existe chez les rôlistes, sous deux formes : le Coucouille actif qui s’en revendique pleinement et s’en gausse entre poteaux, mais essaye de s’en défendre parfois publiquement parce qu’il a conscience qu’éthiquement, il n’est qu’un gros purin qui parle. Et le pseudo-neutre-balec, qui rejoints le con que je décris dans le sens où il se tamponne le fondement de se poser des questions sur la souffrance humaine – sauf la sienne, faut pas déconner.
Le premier vient, pour la nième fois – bon en fait, j’ai compté, c’est la 14ème fois en 5 ans – de passer quelques jours à me cyberharceler, sous couvert d’anonymat, en m’envoyant moult messages de haine, de menaces, de photos dégueulasses, dans le but – exprimé – de me faire taire, juste parce que j’ai écrit un article qui signale que du contenu à la prose douteuse contenant des éléments de langages des cons susnommés, éléments qu’adorent des gens comme Blanquer, Le Pen, Zemmour et j’en passe, c’est pas du tout innocent, et c’est grave de conséquences, dans un magazine de jeu de rôle diffusé en kiosque.
Le premier hurle qu’on fout de la politique partout dans le jeu de rôle, parce que les uns et les autres se soucient, connement, de bienveillance, de protection émotionnelle, de féminisme et d’inclusivité. Mais par contre, quand ça cause menace fantasmée des wokes, cancel culture de mon cul et péril sur le monde du JDR par ces hordes de bienpensants, c’est très bien, ça !
Le premier, quand on lui demande des exemples concrets de leurs craintes – pas moi, hein, je leur cause pas, ils n’ont rien à m’apprendre que je ne sache déjà de l’abime noir et sale de leur esprit – cite soit des excès débiles venus des luttes intersectorielles américaines en université, soit, mieux, cite des exemples tronqués complètement pétés ou d’autres qui sont en fait le fait de groupements moraux chrétiens intégristes. Pour chaque exemple que le premier cite, il y en a dix fois autant, quand on cause de la Cancel Culture et du call-out, venant directement des puissants qu’il révère, de la destruction de livres trop séditieux (id est : gauchistes, humanistes, féministes ou simplement soupçonnés de contenus gays) en passant par le renommage de places et de rues parce que l’ancien nom était trop gauchiasse, madame, sans oublier les réécritures de manuels scolaires pour coller au roman national ou au mythe du néolibéralisme, l’interdiction d’aborder des MOTS et des sujets entiers (homosexualité) à l’école et, récemment… mais ai-je besoin de vous dire ce qui se passe aux USA, en Pologne, en Tchéquie, juste sous nos yeux ?… non ? Bon.
Quand on demande enfin au premier : cite des exemples concrets dans le monde du JDR qui assoie tes craintes, il hurle parce qu’on appelle ici ou là le meneur de jeu meneuse de jeu, parce qu’un petit JDR francophone a osé mettre 60 points médians (moi non plus, j’aime pas le point médian. J’en fais pas un caca nerveux : j’achète pas) et 50 iel sur 300 pages de textes, hurle qu’on efface les caricatures racistes des gentils et méchants des JDR (mais qui s’en soucie, à part les raciste ?!) ou encore bave son indignation que, ho surprise, peut-être parce qu’en fait c’est une bonne idée qui convainc la plupart des auteurs et éditeurs de jeux de rôle, faire quelques pages au sujet de la sécurité émotionnelle dans le JDR, c’est bien, pour se soucier d’autrui ?
Et quelle est la réaction du premier à la dénonciation d’un billet d’humeur injurieux et outrageant dans un magazine de jeu de rôle, provoquant une ire tout à fait légitime des personnes visées et montrées du doigt, c’est-à-dire les seconds ?
1 – monter au créneau pour défendre le billet, son auteur, le magazine, le rédacteur en chef (qui a bien merdé, si j’en juge par ses opinions, ne sait pas sur quel pied danser, mais n’a clairement jamais imaginé que ça parte comme cela, et qui a toute ma sympathie parce qu’il s’est pris une belle tempête de merde, ça ne plait jamais à personne), le tout en étalant, comme de la confiture trop maigre sur une tranche de pain trop large, ses idées nauséabondes dont le contenu est résumé plus haut.
2- lancer une petite campagne de cyberharcèlement sur la grosse salope pédale gauchiasse qui mériterait de crever (j’invente rien, c’est leurs mots) qui a écrit un article pour signaler et dénoncer ce putain de billet d’humeur complètement irresponsable, et expliquer, d’ailleurs, dans l’article, que ça va donner encore plus de confiture aux cochons susnommés. Ce qui a exactement été le cas. Et en profiter, d’ailleurs, pour viser d’autres personnalités actives du monde du JDR, parce que, après tout, quand on est bien chaud…
Le second, lui, qu’est-ce qu’il a fait ? Ben, il a gueulé, publiquement, légitimement. Parfois avec un ton juste et un minimum de patience et de pédagogie pour expliquer en quoi il se sent insulté, blessé, voire menacé ; parfois avec un ton bien merdique et pas très raisonné, qui ferait passer ma prose pour du Musset et un débat politique d’entre deux tours pour une leçon de sagesse platonicienne.
Apparemment, il n’a cependant pas lancé un raid de cyberharcèlement sur plusieurs jours avec menaces de viol, de mort, dickpicks, photos de viol, de charnier de camps de concentrations et j’en passe. Et s’il l’a fait, putain qu’il mérite 1) de se faire défoncer par la justice (faut pas être pressé, et faut avoir espoir, parce que bon…) et 2) d’être dénoncé publiquement (vive le Call-Out) par tous les autres seconds, parce que RIEN NE PEUT JUSTIFIER CELA POUR PERSONNE ! ( surtout pas pour le redac-chef, encore une fois, il a merdé, encore une fois, je lui laisse volontiers le bénéfice du doute).
Le premier est très malheureux, ceci dit, que le rédac-chef se soit pris une injuste tempête de merde (en effet), Par contre, ça le dérange pas du tout que les dénonciateurs du billet d’humeur du mag’ aient pris un abonnement d’une semaine à du cyberharcèlement. Je cite leurs mots : fallait t’y attendre, t’avait qu’à pas ouvrir ta gueule. D’ailleurs, est-ce que le second est bien harcelé, hm ? Quelles sont les preuves ? Ne serait-ce pas une stratégie pour se victimiser ? Oui, ils connaissent bien, c’est leur tactique préférée, « on ne peut plus rien dire ! » balancé sur tous les espaces publiques, qui, dans les faits, leur offrent une tribune pour le dire ; c’est tellement beau.
Le premier VEUT débattre avec le second. Mais débats, il y a déjà eu ! Plein ! Le premier a la mémoire trop sélective pour s’en rappeler. Alors, si c’est sur leur terrain (c’est-à-dire chez eux, avec un public acquis à leur cause, c’est d’ailleurs ce qu’ils demandent « sinon le débat est tronqué »), ben, le second a tort, ment, est illuminé, manipulé, stupide et haineux et est prié de fermer sa gueule –en général, les tauliers s’en chargent pour lui. Et si ce n’est PAS sur leur terrain, le second a tort, ment, est illuminé, manipulé, stupide et haineux, il oppresse et censure la liberté d’expression. Puis, le premier finit soit par se barrer après une dernière saillie injurieuse, soit il lâche un étron de trop, il se fait tej par les tauliers, et se victimise qu’on lui a fait fermer sa gueule.
Quand à un terrain neutre, puisque vous poseriez la question, c’est simple, les animateurs de débats sur Youtube, par exemple, sont tellement, à raison, persuadés que ça ressemblera juste à un débat télévisé d’entre deux tours de présidentielle 2022, mais en encore plus crétin, qu’aucun ne va s’y risquer. C’est la porte ouverte à se prendre la plus gigantesque tempête de merde de l’année. Bon… et en plus, la plupart n’ont guère envie d’entendre causer un des premiers, désolée les mecs (non), mais vous êtes pas trop aimés. Étonnant, non ?
Le seul point commun que j’ai avec les premiers est d’être un homo sapiens : je suis féministe, athée, femme, transgenre, lesbienne, militante humaniste, militante LGBT+, gauchiste, écologiste et j’en passe. Je suis d’origine rurale pure et dure, mais cultivée, éduquée, diplômée ; je suis de la classe ouvrière, mais je cause physique et sociologie avec des experts (et je me rappelle qu’ils en sont, humblement). J’ai évolué dans la pire violence, mais elle a fait de moi une humaniste avide de paix, qui sait qu’on le l’obtient pas sans se battre. Je suis d’esprit cartésien et scientifique, mais je suis illustratrice, romancière, autrice de jeux de rôle. Et je suis leur bête noire, je suis l’incarnation vivante de leurs haines et de leurs peurs rabougries et désuètes ; et pire, je ne suis pas la seule, peut-être même pas la plus bruyante pour les Coucouilles.
Je ne parle pas aux cons. Car les cons ne parlent pas, ils assènent, et quand ça ne marche pas, ils tentent ce qu’ils peuvent pour écraser, discriminer, détruire. Je ne parle pas au cons, car y’a rien à leur dire, y’a juste à parler à tous les autres, pour, à leur tour, asséner aux premiers leur vérité dans la tronche et les laisser achever de moisir et de se dessécher dans leur petit coin.
Et donc, non, je ne débattrais jamais avec eux ; car il n’y a aucun débat à avoir, il n’est pas possible. Qu’ils m’y invitent – et ils le font, ce matin encore – est juste pour eux un moyen supplémentaire de se poser en fausses victimes car ils savent que, comme tous mes collègues, je leur dirais d’aller se faire cuire le cul. J’parle pas aux cons, ça les instruit.
Et quitte à citer Audiard, autant achever en lui rendant un hommage mérité :
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